Comment réaliser un épisode de podcast
PODCASTZAP
Les coulisses du podcast
On se pose souvent la question de comment réaliser un épisode de podcast. Dans cet article, je vous raconte de manière chronologique la conception de l’épisode 108 du podcast Mot Compte consacré au mot vacance – s pour lequel j’ai assuré l’écriture et la voix.
Avant de commencer
Après plus d’une centaine d’épisodes, j’ai appris à comprendre ce qui fait la force d’un bon Mot Compte Triple. Le concept repose sur l’exploration du sens d’un mot en trois minutes chrono en abordant son origine, sa définition et enfin des pensées plus ou moins sérieuses au sujet de son usage actuel ou passé. Mes impressions personnelles et les retours réguliers des auditeurs m’ont permis de préciser les ingrédients d’un bon épisode.
- être utile et agréable en proposant un contenu mélangeant humour et pédagogie. Mon objectif, c’est que l’auditeur puisse se dire qu’il a appris quelque chose tout en ayant un sourire au coin des lèvres.
- trouver un angle pour traiter le mot en surfant sur un fait d’actualité, une anecdote historique ou étymologique. Ce sont souvent des associations improbables qui font le sel de la chronique. C’est un point fondamental à mes yeux car c’est ce qui fait l’unicité et la singularité de ce podcast. C’est une sorte de marque de fabrique à laquelle je suis très attaché. Des experts (souvent plus érudits que moi) passionnés de la langue française ont déjà réalisé l’exercice de traiter de mots à travers des chroniques. Je pense en premier lieu ici à Alain Rey bien entendu mais également à des exemples plus récents. Je prétends faire avec ce podcast un exercice différent car moins formel avec un ton plus décalé.
- prendre du plaisir à enregistrer. Le plaisir de l’écriture doit s’entendre à travers la voix. Si le texte me plaît, cela doit se sentir dans mon intonation. Il m’est arrivé d’enregistrer parfois dans la précipitation ou de façon mécanique en oubliant ce point. Cela s’entend.
- trouver des illustrations qui servent le propos en accord avec l’angle ou provoquant un décalage ou un changement de rythme.
Ces quatre points étant décrits, voyons maintenant comment s’est déroulée la fabrication de l’épisode 108.
Le choix du mot
C’est la première étape mais c’est la moins formelle. Il n’y a pas de règle précise. Tout dépend de mon humeur mais surtout de ce que vis, je lis ou j’entends dans mon quotidien.
Nous sommes le dimanche 4 mai. J-3 avant la sortie de l’épisode. Je suis off ce jour-là. Mais je réfléchis toujours à ce que je pourrais faire comme mot. Pour une fois, je n’ai pas de stock d’avance pour mercredi. Je suis au pied du mur. Cela ne me fait pas plus peur car j’ai appris à me faire confiance. Sans doute parce que je connais la recette et que je sais que je n’ai plus qu’à trouver les ingrédients. C’est à la fois stressant et excitant.
Pour l’épisode 108, nous sommes à 8 semaines de confinement et le thème des vacances revient de manière récurrente dans toutes les conversations avec mes proches. Va-t-on pouvoir partir en vacances cet été ? Pourra-t-on circuler librement ? Les grandes transhumances pourront-elles avoir lieu ? Je le sens bien ce mot. Il me fait penser au juilletiste et à l’aoûtien, ces deux espèces dont j’ai déjà parlé dans l’épisode sur le chassé-croisé.
A cette date, je pense que le juilletiste qui a fait ses réservations depuis des mois pour partir n’est pas bien vu la tournure que prend le déconfinement. Et puis, il risque de s’embêter un peu car le Tour de France a été annulé. Je tiens quelques idées qui me plaisent et que je note sur mon téléphone. Je trouve intéressant de pouvoir décliner le double sens de ce mot au singulier et au pluriel. La vacance, c’est le vide. Y a un truc à creuser. Banco, je choisis de me concentrer sur le mot vacances lundi matin pendant ma session d’écriture de la matinée.
L’écriture du premier jet
Lundi : J-2 avant la sortie de l’épisode. Me voici devant mon Word. Je surfe sur le net pour regarder les définitions exactes des dictionnaires. Larousse et Littré sont mes deux sources favorites. Je consulte Google et différents articles histoire de voir ce qui a été fait. Je cherche également un aspect pédagogique ou une anecdote qui pourrait enrichir la chronique. Les vacances, c’est les congés payés. Je consulte rapidement l’histoire de leur création en 1936 avec le Front Populaire. Bon, c’est assez connu mais je resitue rapidement le contexte et je déniche sur You Tube une illustration sonore des actualités de l’époque. Cela me donne du grain à moudre.
Je démarre la rédaction. Je parle bien évidemment de la vacance du pouvoir. En temps de confinement, le gouvernement est sur le front (c’est la guerre paraît-il) mais très critiqué. Je repense à la phrase d’un journaliste ou d’un ex-entraineur de l’équipe de France qui disait qu’il y a 60 millions de sélectionneurs en France. En ce moment, c’est un peu la même chose avec le déconfinement. Nous sommes 66 millions à avoir notre opinion sur la question. 66 millions de cons confinés… Tiens, tiens con, confinement, déconcertant. Ça en fait des cons… Encore une autre idée que je décide d’exploiter.
Mes idées prennent forme et je fais un premier jet en une heure avant de me faire un petit café. Je n’ai pas de chute…
Comment faire pour avoir la certitude d’avoir ces foutues vacances alors que beaucoup, dont ma femme, attendent de savoir comment ils retourneront au bureau après le 11 mai. Il va falloir retourner au taf masqué. Bingo! Tilacicatam oyé oyé. Je viens de me faire sourire tout seul – petit miracle qui signifie que je suis sur la bonne voie. Bon c’est un peu capillo-tracté mais ça pourrait le faire.
Midi. J’ai un premier jet qui n’est pas si mal mais demande à être retravaillé. Fin de Mot Compte Triple pour la journée. Comme pour une bonne recette de cuisine, il faut laisser reposer le texte. Je terminerai demain matin. D’autres sujets sont à traiter durant l’après-midi.
Le bouclage de l’écriture
Mardi matin : J-1 avant la sortie de l’épisode. Il faut finaliser le texte. Je change l’ordre des phrases, je corrige, j’affine, je supprime deux d’entre elles qui sont du gras. C’est le plus dur. Savoir tailler dans le texte pour ne garder que l’utile qui sonne bien. Je relis plusieurs fois le texte à haute voix pour valider les intonations et les enchaînements. Il faut que cela coule tout seul et que je sente l’énergie du texte dans ma lecture. Mon œil frétille mais butte parfois au détour d’une phrase. Après quelques corrections, je boucle le texte.
L’enregistrement
Confinement oblige, j’ai des guests sous la main. J’ai déjà fait parler plusieurs fois ma fille ainée dans quelques épisodes de Mot Compte Triple et l’un de ceux réalisés pour un client. Sa sœur n’a fait qu’une courte apparition dans un épisode. Je décide de lui faire dire une phrase à propos de la répétition de cons. Cela donnera du rythme à la chronique.
Avant d’enregistrer, je farfouille sur You Tube pour dénicher des illustrations. Parler du fait qu’il n’est pas certain que nous ayons des vacances n’est pas le cœur de la chronique mais fait partie de l’épisode. J’aime bien l’expression « Mais ça c’est une autre histoire. » Yes! Ma discopgraphie années 80 résonne dans mon esprit, Gérard Blanchard évidemment ! Cela fera l’affaire. Je décide aussi de me servir d’un des innombrables posts reçus sur WhatsApp pour illustrer la vacuité de cette période. Ce n’est pas très fin mais cela résume bien ce que nous avons vécus et ces petits instants qui font du bien et permettent de s’évader du confinement.
Je suis confiant et excité car j’ai maintenant tout ce qu’il me faut pour réaliser un bon épisode. Y a plus qu’à.
J’enregistre avec Clarisse juste après le déjeuner. Je branche Audacity sur mon Mac. Je connecte mon micro Blue Yeti et hop je fais quelques prises avec Clarisse après lui avoir fait répéter sa phrase.
Avec elle, c’est plié en 5 minutes après une dizaine de prises et une petite rigolade. C’est un moment de partage. Elle a l’air contente. Moi aussi. C’est mon tour : je fais deux enregistrements du texte en répétant certaines phrases quand j’écorche un mot ou quand le ton ne colle pas. J’ai 8 minutes d’enregistrement à traiter.
Le montage
Je démarre le montage dans la foulée. J’élague puis je rajoute la musique du générique, j’insère les virgules et les illustrations. J’aime bien ce travail. C’est de l’artisanat fait avec rigueur et application. Je réécoute plusieurs fois les yeux fermés pour valider le son et la longueur des enchainements et le bon calage des illustrations. En 1 heure 30, l’épisode est prêt et sauvegardé en format mp3 sur mon Mac.
Il y a les 3 ingrédients de base : origine du mot, définition et digressions. Il y a un peu d’histoire, de l’ironie comme je l’aime. Je suis satisfait.
La mise en ligne de l’épisode
C’est la partie qui m’amuse le moins. Je dois tout d’abord faire la couverture de l’épisode et les 3 vignettes que je vais mettre sur instagram. J’utilise le logiciel canva pour réaliser tout cela. Je rédige la description de l’épisode et le commentaire qui sera associé pour la publication sur Facebook et Twitter. C’est un moment important car il faut résumer la teneur de l’épisode en une phrase. Sur ce coup-là, cela sera assez simple : les vacances, tout le monde y pense, nous on en parle. Coup de bol, Macron fait une allusion au sujet durant une visite d’école en vue du déconfinement. Je suis dans le bon timing semble-t-il.
Il est 17h00, je dépose l’épisode sur la plateforme Ausha en fixant la sortie de l’épisode à 6h00 le lendemain matin. Je peux désormais souffler. Tout est prêt. Je suis impatient d’avoir des retours d’auditeurs.
Pour finir
J’espère que cette petite chronique sur comment réaliser un épisode de podcast vous intéressera. Vous trouverez bien sûr le lien pour écouter ou réécouter cet épisode de 3 minutes. À titre personnel, j’ai adoré pouvoir documenter ma façon de travailler et la partager avec vous. Bonne écoute et à bientôt pour de nouveaux mots.
Antoine Rouchier