Bénédicte Hallion – Elementaire Club
LES COULISSES DU PODCAST # 1
Animée par l’ambition de développer un nouveau média avec une démarche entrepreneuriale, Bénédicte Hallion représente bien cette nouvelle génération qui se lance avec optimisme dans le monde du podcast. Lancé en novembre 2018, Elementaire Club colle à l’air du temps en invitant ses auditeurs à s’interroger sur leur façon de vivre.
Beaucoup de gens pensent que nous vivons une bascule où toutes nos certitudes et nos habitudes sont remises en cause. Les sujets traités par Elementaire Club permettent ainsi de réfléchir sur l’adoption de nouvelles pratiques en matière de consommation, d’éducation ou de travail. Ce podcast contribue à nous sensibiliser sur un nouvel art de vivre.
Nous avons eu envie d’en savoir plus sur ce projet en questionnant sa fondatrice pour qu’elle nous révèle les coulisses de sa nouvelle aventure. Nous avons fait une belle rencontre.
Peux-tu te présenter en nous racontant ton parcours et ce que tu as fait avant de lancer ton podcast ?
Je viens de la pub et des médias. J’ai fait une école de communication à Paris, l’EFAP puis j’ai commencé ma carrière dans l’événementiel et en agence de pub. J’ai ensuite travaillé dans les médias pour le groupe Next Radio TV (BFM TV et RMC) puis au magazine ELLE au sein de la régie publicitaire. Je m’occupais de brand content en travaillant avec les marques et les rédactions pour créer des contenus sur-mesure pour les annonceurs. Ces expériences ont été très enrichissantes mais aussi frustrantes compte tenu de mon côté touche-à-tout. Avec mon rôle de commerciale, je ne pouvais pas à la fois faire partie d’une rédaction et travailler avec les marques au sein de la régie publicitaire.
Aujourd’hui je me consacre à 100% au développement de mon projet tout en donnant chaque semaine 6 heures de cours de brand content à des étudiants en mastère 1 à l’EFAP.
Comment est née chez toi l’envie de créer ton podcast ?
C’est la conjonction de plusieurs facteurs. Je m’intéressais aux podcasts depuis 2 ans, d’abord via mon expérience dans la radio puis en découvrant des podcasts natifs comme La Poudre et Génération XX qu’une amie m’avait conseillés.
En parallèle, j’ai commencé à m’interroger sur ma façon de consommer et de travailler. On parlait de télétravail et je n’en voyais pas la couleur. Je suis passionnée par la mode et j’allais tous les samedis m’acheter des fringues dans des enseignes de fast-fashion. Au bout d’un moment, j’ai réalisé que je n’achetais plus que de manière compulsive sans réel plaisir. En parlant autour de moi, je me suis rendue compte que je n’étais pas seule à ressentir cela. On se disait qu’il n’était pas facile de consommer autrement car on a été habitué à vivre avec un modèle de vie du type posséder c’est réussir. Ayant travaillé dans la pub, je sais de quoi je parle. A l’inverse le positionnement écolo me paraissait un peu trop extrême.
Du coup, je voulais traiter ces thèmes de manière sexy en utilisant un nouvel outil. Le format long du podcast me rassure pour contrer cette frénésie de contenus courts qui envahissent les réseaux sociaux. On observe que l’attention baisse mais le podcast démontre qu’il y a des gens qui veulent se nourrir en écoutant jusqu’au bout des contenus de 35 à 40 minutes. Le podcast, c’est le média slow parfait pour traiter ces nouvelles tendances.
Quand le magazine Elle a été racheté, j’ai décidé de partir sans savoir ce que j’allais faire. J’ai pris trois mois pour mûrir mon idée sans arriver à l’assumer pleinement au début. Tous les gens autour de moi m’ont aidée à passer à l’acte parce que cela faisait des mois que leur parlais des podcasts. J’avais du mal à me dire que j’allais devenir entrepreneuse et que j’allais créer un vrai média. Le truc était devant moi mais je ne le voyais pas.
Certains de mes amis se demandent comment je vais gagner ma vie et la question reste d’actualité comme dans tout projet entrepreneurial mais globalement j’ai été encouragée, y compris par mes parents quand ils se sont documentés sur le phénomène aux USA.
Peux-tu nous expliquer le concept de Elementaire Club ?
J’ai souhaité créer un podcast pour se questionner sur tous nos modes de vie. Je ne voulais pas me limiter à un podcast sur l’écologie et l’environnement. A chaque épisode, on se met volontairement à la place de l’auditeur en traitant chaque sujet en novice en essayant de recueillir différents points de vue. C’est un parti pris de traiter nos sujets en mode de reportage pour se différencier des podcasts de conversation et montrer à l’auditeur que le journaliste est en immersion sur le terrain.
10 épisodes forment une saison. La première, en cours, ira jusqu’à mars. Elle est constituée uniquement de reportages alors que la saison 2, à partir d’avril, alternera des reportages et des interviews appelées « La relève » avec des gens ayant un impact sociétal ou environnemental. On aura, par exemple, une créatrice de mode éthique.
Elementaire Club ce n’est pas simplement un podcast ?
Aujourd’hui, nous offrons un podcast et une newsletter qui s’appelle La Relève où nous sélectionnons une marque, une personnalité ou une association qu’on a envie de mettre en avant gratuitement pour son impact environnemental ou sociétal.
Nous travaillons à la constitution d’un club qui verra le jour cet été. En échange d’une adhésion mensuelle, tous les membres auront accès à des événements dédiés avec des conférences et des ateliers autour de la thématique apprendre à ralentir et consommer autrement. On souhaite apprendre aux gens à déculpabiliser sur le fait de ralentir. On organisera également pour nos membres des séances de ventes privilégiées avec des partenaires et nous leur diffuserons des podcasts dédiés. La première campagne d’adhésion sera organisée au mois de juin sur Ulule. On souhaite développer une communauté pour répondre à un besoin d’appartenance.
Peux-tu nous parler de la fabrication des épisodes de ton podcast?
Je travaille aujourd’hui avec une équipe de 4 journalistes freelance rémunérés à la pige. Il sont très impliqués sur le projet. On va se renforcer pour la deuxième saison. Je définis pour chaque saison la liste des sujets et je les laisse choisir ceux qu’ils veulent traiter. On essaye de choisir des thèmes dans l’air du temps. La création de chaque épisode s’étale sur un mois. En amont, il y a la recherche des intervenants et un peu d’écriture. On essaye d’avoir des gens avec des avis différents pour ne pas se poser en donneur de leçon. On veut susciter le débat. Il y a un très gros travail de montage pour sélectionner les bons passages de chaque intervenant et les entrecouper avec des commentaires éditoriaux de qualité. En ce moment on travaille sur les épisodes du mois d’avril. La dernière étape se fait avec Aurélien Ung, notre mixeur, pour nettoyer et assurer la qualité. Certains épisodes sont sponsorisés par un annonceur.
Quels sont selon toi les ingrédients d’un bon épisode de podcast ?
Clairement les intervenants ! On fait un travail journalistique. Il faut qu’on ait envie d’écouter la personne. La thématique et le ton sont également très importants. On cherche de l’authenticité dans les témoignages. Si à la fin d’épisode, l’auditeur se dit que le podcast va le faire réfléchir, c’est qu’on a bien travaillé.
Quel est le sujet que tu rêves de traiter ou la personne que tu souhaiterais absolument avoir dans ton podcast ?
On court après Thierry Marx pour le faire participer à un épisode sur les végans. J’adorerais traiter les nouveaux systèmes de travail : les digital nomades et les slasheurs.
Quelle est ta vision sur l’avenir du podcast en France ?
Personnellement, je suis dans une démarche entrepreneuriale indépendante. Je pense que certains médias traditionnels vont disparaître au profit de médias de niche. Le podcast est un format rêvé pour cette tendance. Il y a des gens qui le font à côté de leur boulot de façon un peu artisanale pour se faire connaître. Il y a ceux qui veulent en faire un business comme les studios. Et puis il y a les gros médias et les radios. Tout reste ouvert ! C’est pour cela qu’on se diversifie.
Tu entretiens des relations avec d’autres podcasteurs?
Je connais bien Siham Jibril de Génération XX. J’adore ce qu’elle fait. Je commence à avoir d’autres contacts. Je trouve qu’il y a une atmosphère bienveillante entre nous. J’aime bien Transfert et Les Déviations.
Merci Bénédicte. Longue vie à Elementaire Club !